Association ethnographique

Catégorie : Belle Epoque (1890-1910) (Page 3 of 4)

Raymond SUDRE, du monumental à la finesse de la porcelaine de Sèvres.

« Nous avons encore remarqué une Helena miniature en Sèvres et un buste d’Helena en marbre. Citons encore une Sainte-Cécile, bas-relief en bronze d’une belle allure, la Femme au givre d’une rare finesse d’exécution, etc. Mais nous avons eu surtout plaisir à nous attarder dans la contemplation du buste de Catalan, morceau détaché du monument du square, non encore inauguré Montanyes Regalades.

Ce buste de Catalan a été conçu par l’artiste dans une admirable pureté de lignes, hors de toutes conventions et exécuté à la perfection. Le monument Montanyes Regalades ne figurait pas à l’exposition de M. Sudre, en raison sans doute de ce que la manufacture de Sèvres n’a pu l’exécuter avant qu’il soit inauguré.

Mais une eau-forte éditée par la Société des Amis des Arts que M. Sudre avait exposée, en donnait une idée très vigoureuse et très exacte. Il convient de signaler la valeur intrinsèque de cette œuvre qui fut la seule du Salon de 1908 à laquelle la Société des Amis des Arts que préside le maître Bonnat fit le grand honneur de l’éditer.

En terminant cet éloge de l’exposition de Raymond Sudre, nous exprimerons le regret que la Fontaine à la Catalane qui doit orner la place de Baixas, n’ait pu figurer en miniature, dans cette exposition. Il ne nous a été permis de la juger que d’après des cartes postales ; mais l’ensemble nous a paru parfait et d’une belle venue.

Biscuit de la Catalane, figure centrale de la fontaine de Baixas.

La Catalane est fièrement campée en grandeur naturelle et rien n’est plus gracieux que son geste. Voilà encore une belle œuvre qui classe Raymond Sudre aux premiers rangs de nos artistes catalans catalanisants. »

Un Amateur Catalan, La Revue Catalane, 1910.

L’âme roussillonnaise, conférence de Jean Amade

Conférence de M. Jean Amade, professeur au Lycée de Montpellier sur l’Ame roussillonnaise. Interprétation de Lo cant del Vallespir. Grand Théâtre de Perpignan. Dimanche 22 décembre 1912, à 16 heures 

Notre ami M. Jean Amade a donné, le dimanche 22 décembre dernier, au théâtre de Perpignan et sous les auspices de l’Association polytechnique, une conférence sur l’Ame roussillonnaise, au cours de laquelle a été interprété Lo Cant del Vallespir, dont nous avions parlé ici même lors des belles fêtes de Céret en juillet 1911. Une heure avant la conférence, la salle se trouvait déjà tellement pleine qu’il devenait impossible d’entrer : les couloirs eux- mêmes étaient inaccessibles, ainsi que les coulisses. Jamais, croyons-nous, on n’avait vu tant de monde à une conférence. Nous nous en réjouissons de tout cœur, car cette conférence fut une véritable manifestation catalane. Y a-t-il une âme roussillonnaise et quelles en sont les manifestations ou expressions ? Comment pouvons-nous contribuer à la maintenir toujours aussi vivante et agissante ? Tel était le sujet que devait traiter M. Jean Amade. Le conférencier montra que cette âme se personnifiait dans la race, dont les caractères expriment les tendances principales de l’âme roussillonnaise, et indiqua par quels moyens on pouvait conserver à notre race toutes ses vertus propres : éducation morale, éducation physique. Puis il marqua nettement les rapports très étroits qui unissent notre race, et par conséquent l’âme roussillonnaise, à la terre, au paysage, invitant ses compatriotes à garder aussi intimes et constants ces liens précieux qui sont pour nous comme une sauvegarde et une garantie.

Mais c’est peut-être surtout par la langue que se traduit le mieux l’âme de notre race, et c’est en elle qu’on la sent le mieux palpiter : cultivons donc cette langue avec amour, ne la laissons pas se perdre, et luttons pour elle sans défaillance. D’autre part, c’est par la tradition que l’âme d’un pays se transmet et se prolonge : développons par conséquent en nous, autour de nous, le respect de la tradition, utilisant même pour elle les forces nouvelles qui, au premier abord, semblent la combattre. Enfin, puisque le folklore est une matérialisation populaire, si l’on peut dire, de l’âme régionale, tournons vers lui notre attention et faisons-le entrer dans notre vie quotidienne ; c’est un pieux et agréable devoir. M. Jean Amade a dit un mot, en passant, de l’art sous ses différentes formes, mais sans y insister parce qu’il avait déjà fait, il y a quelques années, une conférence sur l’art catalan. I1 agrémenta sa conférence sur l’âme roussillonnaise par des récitations ou lectures de certains poèmes, comme lo Gall de Santjoan d’Oun Tal, qui obtint un vif succès, Aniversari du Pastorellet de la Vall d’Arles et Ayres de Nadal de Joseph-Sebastià Pons, qui furent accueillis l’un et l’autre avec des applaudissements chaleureux par l’auditoire.

En terminant, notre ami dit que, dans la France entière, se produit un admirable réveil des forces régionales, et que l’idée régionaliste fait chaque jour de grands progrès dans tous les esprits. Rien ne découragera, d’ailleurs, les ardents patriotes qui ont entrepris de donner un sang nouveau à la nation. Le public, qui avait écouté avec une attention et un intérêt soutenus toute la conférence, dont nous ne pouvons donner malheureusement qu’une idée bien incomplète, salua les dernières et si énergiques paroles de M. Jean Amade par une longue et enthousiaste ovation, montrant par là qu’il approuvait les nobles idées développées avec clarté et défendues avec éloquence par notre vaillant ami, dont l’infatigable persévérance ne connaît pas d’obstacles et trouve toujours des raisons nouvelles de se multiplier. Nous ne dirons qu’un mot de l’exécution du Cant del Vallespir.

Elle fut parfaite, elle fut admirable. Cette merveilleuse cantate du jeune maître M. Déodat de Sévérac est un chef-d’œuvre digne de rester. Nous avons passé, en l’entendant, des minutes délicieuses, inoubliables ; nous aurions voulu l’entendre une fois encore, l’entendre longtemps, avec ses phrases passionnées, colorées, émouvantes, où semblait chanter et se plaindre toute la terre de Roussillon. Une centaine de choristes et de musiciens, venus de Céret, les damés en bonnet catalan et les hommes en barretina, (l’ensemble étant dirigé par M. Louis Roque, directeur de l’Harmonie du Vallespir, qui prêtait aussi son concours), tels furent les héros, on peut bien le dire, de cette magnifique manifestation, qui obtint auprès du public un immense succès.

Après la cantate, les mêmes artistes interprétèrent Montanyes Regalades, sous la direction de M. Adrien Amade, père du conférencier. Ce fut également un triomphe. Félicitons le ténor Rancourt, qui nous fit si bien comprendre la poésie de cette vieille mélopée. Mais félicitons surtout Madame Sors et Monsieur Henri Sabaté, qui chantèrent avec tant d’âme les soli de la cantate. En résumé, nous devons être contents et fiers de la superbe fête catalane du 12 décembre. Elle comptera certainement dans l’histoire de la Renaissance roussillonnaise. Et tout cela ne peut que réjouir le cœur des bons Catalans du Roussillon.

Louis Pastre.

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