Travaux d’aiguille dans un intérieur de l’extrême fin du XVIIIe s.

Ce document a été rédigé à une période troublée de l’histoire du Roussillon. Des membres de l’administration révolutionnaire sont appelés à inventorier au village du Soler, les affaires laissées sur place par la famille Debouches. Le père de famille était militaire, proche du pouvoir royaliste. Il a probablement rejoint comme tant d’autres la Catalogne frontalière afin d’éviter la prison.

Ainsi l’inventaire ne contient ni les habits emportés sur eux, ni aucun bijou, un bien facile à conserver sur soi afin de subsister dans les périodes difficiles. Le restant des habits et textiles trouvés sur place font une grande part à la fois aux productions de laine (flanelle, laine blanche…), de soie (soie cramoisie, soie jaune) et de coton à motifs tissés (cotonnades flammées) et à motifs imprimés (indiennes). L’habillement féminin est intéressant à plus d’un titre puisque l’on retrouve l’ensemble des pièces du costume populaire : coiffes, serre-têtes, bas, jupons piqués (cotillons), corsets, tabliers, chemises.  On notera aussi des outils permettant de réaliser à domicile filage, dentelle, broderie et bien sûr piqûre ou matelassage. Production phare de Marseille, le piquage était aussi pratiqué en Roussillon.

« Inventaire des effets qui se sont trouvés dans la maison curiale du Soler, aux appartements où logeaient les citoyens dénommés Debouches, père et ses deux filles, commencé le 4 ventôse de la 2ème année de la République conformément à la réquisition qui a été faite par les citoyens G. Triquera, R. Morat, membres du district de Perpignan : dans une garde robe de couleur grise y avons trouvé 51 chemises de femmes, deux cortinages de lit complet cotonnade flammée, quatre rideaux cotonnade flammée de fenêtre, cinq rideaux de fenêtre blancs, deux rideaux d’indiennes rouges, un habit d’homme…., deux habits bleus de commandant de place galonnés avec boutonnières d’or, deux vestes rouges l’une galonnée l’autre sans galons, une veste en flanelle, deux vestes blanches, deux paires de culottes bleues, un devant de veste brodé, deux couvertes de lit blanches de filadis ou coton, une couverte de lit verte, une couverte de lit de fil ou treillis, un gros rideau de toile grossière, un étui avec deux perruques dedans, une couverture en cotonnade flammée, douze chemises d’homme, un manteau bleu, une robe de chambre en flanelle, un petit rideau blanc, trois cotillons d’indienne, cinq cotillons blancs, un cotillon de soie mêlée, un casaquin de soie jaune, un corset bleu, une robe de chambre de femme en soie jaune, une robe de chambre de femme en soie cramoisie brodée coupée en deux morceaux, deux tabliers rouges en indienne, cinq casaquins en indienne, treize corsets blancs de femme, cinq paires de poches en cotonnades, deux jupes en indiennes (rajoutées à l’inventaire), sept paires de bas de femmes blancs, deux paires de bas blancs d’homme, dix coiffes de femmes dans un panier avec treize patrons à broder, cinq serre-tête de femmes, une paire de sabots de femme, deux paquets de chiffons avec deux paires de caleçons dedans , trois paires de souliers de femmes d’étoffe en mauvais état, une bourse garnie de fuseaux à faire les dentelles, deux quenouilles avec leur fuseau et aspi, six tours de cols blancs, deux coussins à faire les dentelles, un métier pour piquer les étoffes en bois, un autre métier à broder en bois, un jeu à jouer aux dés dit jacquet, une boite en fer blanc avec des fers à friser, une bonnette de laine blanche, deux chapeaux de paille noirs [1] ».


[1]          ADPO, 1Qp 459.