La proximité de l’Espagne fait de Perpignan la résidence intermittente du gotha et  de la noblesse espagnole lors des guerres carlistes. On note surtout le passage de Marie Christine de Bourbon (1806-1878), princesse royale des Deux-Siciles, qui fut Reine consort (1829-1833) puis régente d’Espagne (1833-1840). Son passage en 1840 fut bref. La veuve de Ferdinand VII, arrive à Port-Vendres à bord du bateau vapeur Le Mercurio le 19 octobre.

Marie Christine, reine d’Espagne

Elle séjourne à Perpignan à l’Hôtel de la Préfecture. « À Perpignan elle est descendue à l’Hôtel de la Préfecture ou elle a couché après avoir admis à sa table le Préfet, le général, le frère de Munos [1], et plusieurs autres personnes. A la suite de ce diner, un courrier a été expédié à Louis-Philippe pour lui rendre compte des évènements de Valence, et réclamer pour la jeune Isabelle, l’appui du cabinet des Tuileries [2]. »

Elle ne voulut recevoir d’honneurs, mais participa à quelques diners. Le général de Castellane dit d’elle : « sa figure est jolie, elle est femme d’esprit. Comme elle a beaucoup d’embonpoint, elle parait petite ; son embonpoint est d’autant plus frappant qu’elle ne porte pas de corset. » Le lendemain, avant de quitter Perpignan pour se remettre en route pour Marseille en passant par Montpellier, elle fit entrer, pour les saluer, les nombreuses femmes de la société qui étaient simplement venues la voir passer.

Elle reviendra peu de temps en Roussillon le 26 février 1844 pour son retour en Espagne. Passant par Sans, Avalon, Chalon, Lyon, Montpellier, la reine est accompagnée d’une suite composée de trois de ses nièces, la comtesse de Belascoai sa dame d’honneur, le duc de la Roca-Togores, grand d’Espagne, chargé de fonction de grand maître de maison, le duc de San Carlos son grand écuyer, le médecin Rubio, le chapelain Fulleda ainsi que quatorze domestiques des deux sexes.

« En février 1844, la Députation provinciale et la municipalité de Barcelone envoyèrent plusieurs de leurs membres à Perpignan, au-devant de la Reine Christine qui rentrait en Espagne. Le général de Castellane les accueillit avec cette politesse qui font chérir son nom par les Espagnols, que les divers événements politiques ont successivement forcé à chercher un refuge en France, par la frontière de Catalogne [3].»

Elle assista avec les délégations à la messe en la cathédrale puis à un simulacre de guerre sur les glacis des remparts, organisé par le général de la place. Le départ fut donné pour accompagner l’altesse royale jusqu’au Perthus.

« Le trajet de Perpignan au Perthus s’est fait le 28 février par un temps affreux. La neige et la grêle s’étaient jointes à l’ouragan qui régnait ce jour-là dans toutes les contrées. Sur les routes, plusieurs charrettes furent renversées, et les chevaux entraînés dans des tourbillons, furent jetés avec leur cavalier dans les fossés. Plusieurs soldats et un officier de l’escorte de cavalerie périrent ainsi désarçonnés et jetés à bas. Enfin tant bien que mal on arriva au Perthus à dix heures, mais au grand étonnement de tout le monde, le baron de Meer, qui devait se trouver à la frontière, avec des troupes pour recevoir la reine-mère, ne paraissait pas. On ne savait à quoi attribuer ce retard et Marie-Christine voulait de toute force retourner sur ses pas. Il fallut que le général de Castellane insistât vivement auprès d’elle pour la faire revenir sur cette détermination, et encore n’y aurait il pas réussi d’après plusieurs témoins, si les chevaux de l’escorte, qui venaient de faire une si longue course, avaient été en état de repartir [4]. ».

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[1]              Il s’agit donc du frère de Agustín Fernando Muñoz y Sánchez (1818-1873), militaire espagnol et second époux de la reine et régente Marie Christine.

[2]              La Revue des Modes, Paris, 1844, p.141.

[3]              Revue générale, biographique, historique, etc. Le Biographe universel et l’historien, ed. E. Pascallet, Paris, 1845, p.225 et suiv.

[4]              Le compilateur, revue des journaux français et étrangers, 1844, p.244.